Comment nos traumatismes s'inscrivent dans nos gènes

ADN - L'effet des traumatismes sur le génome, via l'épigénétique, semble bien démontré: ces modifications épigénétiques auraient pour cible certains gènes impliqués entre autres dans la gestion du stress, la réactivité aux évènements ou la régulation des émotions.

Nos gènes portent la trace de nos traumatismes

   ADN – L’effet des traumatismes sur le génome, via l’épigénétique, semble bien démontré: ces modifications épigénétiques, qui affectent le fonctionnement des gènes sans passer par des modifications de leur séquence ADN, auraient pour cible certains gènes impliqués entre autres dans la gestion du stress, la réactivité aux évènements ou la régulation des émotions.

   Vulnérabilité accrue au développement de troubles psychiatriques en découlant, signes d’anxiété, ou autres manifestations de mal-être. Comme d’autres facteurs environnementaux, le stress ou le traumatisme psychologique pourraient donc avoir des conséquences biologiques. De là, des traces, des marqueurs biologiques, sous-jacents aux symptômes?

   Diverses cohortes de personnes ayant vécu des stress majeurs, comme des militaires, des enfants exposés à des situations dramatiques, des victimes de catastrophes naturelles, ou de guerres ont été investiguées pour définir la présence de modifications épigénétiques, dans des gènes spécifiques, par comparaison avec des individus n’ayant pas subi ces stress.

   Ces études rapportent des différences notamment dans des mesures de méthylation de l’ADN, une des modifications épigénétiques les mieux connues à l’heure actuelle, pour divers gènes exprimés dans le cerveau (gènes du transporteur de la sérotonine SLC6A4, du récepteur aux glucocortocoïdes NR3C1, du facteur neurotrophique BDNF, par exemple), pour d’autres régions répétitives du génome, ou même pour des gènes liés aux fonctions immunitaires. Ainsi, des mesures de laboratoire, sur de l’ADN extrait de salive, sang, ou autre, semblent pouvoir permettre de quantifier la méthylation de l’ADN des gènes en cause, permettant d’établir un lien avec le stress vécu. Et cela, même des années plus tard.

   Un bond en avant pour la neuroépigénétique, la neurobiologie, la psychiatrie, avec la compréhension de comment un environnement fortement délétère peut aboutir à des symptômes ou à une vulnérabilité accrue au développement ultérieur de troubles psychologiques/psychiatriques. Pourtant, l’opposé n’est pas tout-à-fait exact : toute modification de la méthylation de l’un de ces gènes n’est pas diagnostique d’un traumatisme ou d’un stress majeur. Il n’est pas possible à l’heure actuelle de démontrer la spécificité de ces traces, par rapport à un évènement, lequel, quand il a eu lieu, et d’autres éventuelles interférences.

   En effet, des substances chimiques, des toxiques environnementaux, un mode de vie propre à chacun, affectent également, par des modifications épigénétiques, de très nombreux gènes.

   Là aussi, la spécificité de quel facteur a pour cible quels gènes est en pleine exploration. Finalement, il faut aussi garder à l’esprit le fait que, génétiquement, il y a des différences entre les individus et leurs possibles prédispositions à développer des troubles psychiatriques.

   Certaines variations dans la séquence ADN (gènes du récepteur dopamine D2, du récepteur sérotonine 2A, du transporteur de la dopamine SLC6A3, par exemple) semblent bien associées plus fréquemment à certaines pathologies ou à des syndromes de stress post-traumatique . Plus compliqué encore, une étude à peine publiée rapporte que des individus porteurs de certaines variations de séquence ADN dans les enzymes de méthylation, donc médiatrices des modifications épigénétiques, seraient plus fréquentes chez certains patients psychiatriques que chez d’autres: une différence génétique en amont de certaines modifications épigénétiques, lesquelles peuvent être consécutives à des facteurs environnementaux traumatisants…

   Tout cela constitue un champ d’investigation formidable, une connaissance et reconnaissance des difficultés psychologiques, des vulnérabilités individuelles sous-jacentes, et des effets à long terme d’un stress ou d’un traumatisme, par les traces qu’elles peuvent laisser.

   Mais est-ce que cela enlève la possibilité de croire à des troubles ou d’en souffrir, si le substrat biologique n’est pas objectivable? Espérons que non. Peut-on imaginer des psychiatres ayant dans le futur à connaitre la séquence ADN de leurs patients et à mesurer l’intensité des traumatismes vécus par méthylation de leur ADN, avant d’envisager de les traiter?

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